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16 juin 2009

Réflexions autour de l'âge de la retaite

HCoup de flash sur Henri Chapier....qui continue à charmer avec sa voix de velours - la voix ne vieillit pas - à 76 ans passés (cf. son livre, et la promotion qu'il en faisait ce matin sur Europe 1).
La polémique ressurgit, elle servira de toile de fond de campagne de 2012, et bien naïfs ceux qui enterrent encore la tête dans le sable. Bien évidemment, on ne pourra pas continuer à nourrir à ne rien faire pendant quarante ans des salariés qui n'auront cotisé que trente annuités après avoir accumulé des années d'études totalement improductives ! Tout le monde peut comprendre que les solutions sont archi-simples : pour équilibrer le système de la répartition, il faut soit augmenter les cotisations de ceux qui travaillent (mais actuellement, le taquet supérieur semble avoir été atteint), soit diminuer les pensions servies, soit augmenter la durée des cotisations, substantiellement. Et pourquoi pas les trois moyens à la fois ?

FillonCourage, Fillon ! De toutes façons, les gros bataillons des babyboomers seront déjà en retraite en 2012, donc ils pourront voter des mesures restrictives sans broncher....
L'objection arrive immédiatement : on ne peut efficacement augmenter l'âge légal de départ à la retraite quand les entreprises licencient à moins de 60 ans !

Eh oui, les entreprises licencient les salariés qui coûtent trop cher et qui ne "rendent" pas assez. Parmi ceux-ci, il arrive souvent que les plus vieux soient visés en priorité. Moins malléables, moins performants (voire !), et surtout dans leur grande majorité d'accord pour partir avant l'heure avec 75% du salaire net (pendant leur période de chômage) et des cotisations virtuelles gratuites jusqu'à l'âge où ils pourront "prendre la retraite à taux plein".....
On a tout essayé pour éviter le phénomène. On avait même institué une pénalité croissante avec l'âge pour dissuader les entreprises de procéder à ces licenciements. Cette pénalité (la Contribution Delalande) n'a dissuadé personne, surtout lorsque les salariés sont demandeurs. Car souvent, ils ne sont plus intéressés par leur travail, rien ne les retient.

Reculer l'âge légal de la retraite à taux plein n'implique pas que tout le monde doive travailler jusqu'à 67 ans ! Cela signifie simplement que chacun choisit de partir selon le niveau de la pension qui lui parait suffisant pour ses besoins. Si certaines personnes veulent partir à 60 ans et acceptent un abattement significatif sur la pension, elles le pourront toujours. Si d'autres considèrent qu'elles n'ont pas assez, et en particulier les couples recomposés ayant eu des enfants sur le tard, elles continueront. Reste à résoudre le cas des salariés ayant exercé des postes physiquement pénibles. On nous sort le cas des pompiers...pourquoi pas celui des danseurs étoile de l'Opéra de Paris pour lesquels la retraite se situe à 45 ans...Certes, il faut y réflechir. Mais ne laissons pas accaparer le débat par des situations particulières. Quel est le pourcentage de salariés du secteur tertiaire et de la partie purement administrative de la fonction publique ?

Ir_ne_et_Yvette_DutierLe choix d'un départ précoce est souvent le fruit d'une soif de liberté. regardez madame Dutier (plus de 80 printemps, ici avec sa fille), commerçante au marché de Fumel. Elle travaille toujours !

A partir d'un certain moment cependant, on n'a plus rien à se prouver et on ne supporte plus tellement d'être managé par d'autres....pas forcément aussi compétents. Et pour obéir, dans le système français de La logique de l'honneur (voir le merveilleux ouvrage de Philippe d'Iribarne), il faut admirer.
Moi, j'ai choisi de partir (à 60 ans passés, ce qui est un privilège) à la fois parce que mes besoins sont relativement simples, que j'avais le nombre d'annuités nécessaires et parce que je ne souhaitais plus obéir à ma hiérarchie. Si j'avais été indépendante, j'aurais continué !

La question de l'âge du départ en retraite est donc profondément correlée avec le statut de salarié, qui implique la soumission. Et si le salariat n'était qu'une situation transitoire au regard de la longue période (comme aurait dit F. Braudel), un passage obligé dû à la révolution industrielle ? Demain, n'aurons-nous pas plutôt tendance à développer des activités individuelles de prestations de services, une logique de contrat et non plus d'asservissement ?
La question du départ en retraite sera alors envisagée autrement. Mais il faudra mettre en place un autre système de cotisations assurant la solidarité des uns et des autres. Un système obligatoire basé aussi sur la répartition, ou la solidarité entre les générations, puisqu'aujourd'hui, la crise financière aidant, plus personne n'évoque la capitalisation.

Ne rêvons pas. Mais interrogeons-nous sur les dispositions à prendre pour redonner le goût du travail aux plus de 50 ans, sans leur faire sentir chaque jour qu'ils pèsent sur le compte d'exploitation. Il faudra être imaginatifs, tant le tropisme "videz les vieux" est fort. Une question de regard, de culture. C'est pas gagné !


Posté par Bigmammy à 09:31 - Coup de gueule - Commentaires [2] - Permalien [#]
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Commentaires

  • - lenteur ou procrastination ? d'ici que je poste mon commentaire, bigmammy aura publié une bonne dizaine de billets alléchants, instructifs, optimistes, hédonistes, motivants.

    - pourtant quand je l'ai lu hier je me suis dit que je n'allais pas laisser passer l'occasion de dire à l'auteur mon admiration sur l'acuité de son analyse d'un problème qui me touche de très près aujourd'hui, à J-10 !

    - ça sera donc sous une forme décousue, hachée, pas ficelée (sinon ce sera dans trois mois)...

    - pour moi aussi la retraite est un moment choisi, et j'ai décidé de ne pas jouer les prolongations (j'ai commencé à travailler en 1973), je pars donc à pile 60 rides (expression récemment découverte chez une amie du même age !).

    - je reconnais avoir fait l'autruche en ne voulant pas m'exprimer sur les raisons de ma coupure choisie avec le monde du travail, et bien en fait je ai trouvées, évidentes, ces raisons, dans le billet de bigmammy :
    - "pour obéir il faut admirer", et pour moi c'est de moins en moins le cas... "mes admirations" actuelles sont toutes en dehors du monde dit du travail (des artistes, des artisans, des étudiants, des retraités, des enfants, des mères au foyer, des blogueuses, des blogueurs, et j'en oublie)
    - marre d'un statut qui implique la soumission

    - il y a cinq/six ans j'ai eu un "accident du travail", ma carrière que tout le monde s'accordait à trouver si équilibrée et linéaire, s'est soudain cassé la margoulette, a trébuché sur la crise financière d'alors, l'éclatement de la bulle internet comme on disait en ce temps là

    - le chômage à 55 ans, pendant douze mois, homme ou femme, c'est pas drôle mais on en réchappe, la preuve

    - c'est à cette époque d'ailleurs (j'avais le temps...) que j'ai découvert la valeur des réseaux sociaux sur internet, et des blogs, pour la création entre les gens, de liens plus forts qu'on ne le croit généralement

    - à propos des voix qui ne vieillissent pas (Chapier), j'ai eu le bonheur d'aller il y a quelques semaines entendre René de Obaldia, 90 étés, lire des extraits de son œuvre et raconter des anecdotes sur ses nombreux et magnifiques interprètes, et puis il y a deux jours, toujours, Marcel Zanini, 85 ans, qui donne une fois par mois un concert au Petit Journal St-Michel avec ses musiciens

    - je souhaite un bel été à bigmammy et sa grande famille, la vraie, et ses lecteurs

    Posté par tilly, 18 juin 2009 à 15:09
  • Bienvenue au Club, Tilly !

    Je suis certaine que vous n'allez plus savoir où donner de la tête, dès que vous serez - comme on dit tout à fait à tort - "retirée" des affaires. Et j'aurai alors le plaisir de lire vos critiques et analyses sur votre blogue bien plus souvent. Ainsi que celui de vous revoir, pour une expo en filles, par exemple ?

    Posté par Bigmammy, 18 juin 2009 à 15:42

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