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Journal de bord d'une grand-mère grande lectrice et avide de continuer à apprendre, de ses trois filles et de ses 7 petits-enfants.
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25 février 2014

Le pays du lieutenant Schreiber, récit par Andreï Makine

Makine schreiber

Andreï Makine est un écrivain couvert de prix littéraires, d’origine russe mais d’expression française, qui n’arrête pas de payer ses dettes. Il rend, par ce court essai, un hommage très personnel à un homme juste, droit, « taillé à la serpe », un héros de la guerre de mon père, et ainsi, tente de compenser un ratage littéraire dont il se sent responsable.

Il a rencontré en 2010 Jean-Claude Servan-Scheiber, le cousin du médiatique Jean-Jacques, et le convainc de rédiger ses mémoires de guerre. C’est un récit tellement chargé de symboles que celui de ce jeune intellectuel qui combat glorieusement au cœur d’une armée battue à plates coutures, qui sera simultanément félicité et rayé des cadres de l’armée en vertu du statut des Juifs de 1941, puisque, quoiqu’élevé dans la religion catholique et croyant, sa famille est d’origine juive. Las, même si Makine déniche un éditeur, le livre ne rencontre qu’indifférence. Pas un article, pas une critique … Rien que le mur de l’indifférence.

C’est pourtant une histoire qui évoque en moi bien d’autres destins similaires : celui de mon père, fait prisonnier en mai 1940, plus encore celui de Pierre Briot, engagé dans la Ière DB et passé lui aussi par Miranda del Ebro et qu’il a peut-être rencontré dans les plaines enneigées d’Alsace, celui du père de Jacques Tardi, embourbé lui encore dans son char et fait prisonnier pour tout le temps de la guerre.

Mais c’est surtout pour l’auteur une occasion de règlements de comptes avec les tenants d’une idéologie qui fut aussi dominante que vaine … qui, par le miracle d’une « formidable berlue intellectuelle allait diviniser quelques hâtifs penseurs ». Il s’agit des tenants de l’existentialisme : Sartre, Beauvoir, Camus … qui ripaillaient dans les derniers mois de l’occupation alors que les Français s’évertuaient à trouver de quoi survivre tandis que de jeunes hommes courageux donnaient leur vie pour terminer la guerre et sauver l’honneur.

Le style est pur, l’écriture regorge d’invocations lyriques avec des retours, des redites voulues comme des anaphores – le soldat Francis Gilot, les tankistes Leper et Catherineau – une sorte d’exorcisme à l’usage surtout de l’auteur, sublimant la biographie d’un homme de quatre-vingt douze ans qui n’en demandait sans doute pas tant … L’avantage est que la lecture est fluide et rapide : une journée y suffit.  Les héros n’ont pas besoin de hérauts.

 

Le pays du lieutenant Schreiber, par Andreï Makine, aux éditions Grasset, 224 p., 17€

Commentaires
L
Je suis totalement d'accord avec vous et avec votre analyse du roman d'Andreï Makine ! Une écriture classique qui fait du bien, et une réflexion intense du début à la fin. Un livre à lire absolument !
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