« Ceux que Jupiter veux perdre, il les rend fous. » dit le proverbe latin … Voici décrit par le menu un processus de désintégration machiavélique par lequel une jeune femme, si jolie, si attachante, se sent progressivement tirée vers la folie meurtrière. Pourquoi elle, la belle et vaillante Sophie, si sympathique, si frêle et pourtant si intelligente, comment en est-elle arrivée au point de devoir tout consigner dans un petit carnet de moleskine noire pour retrouver les morceaux épars de son existence à présent semée de cadavres ?

Voici donc un thriller dans toute sa splendeur. Pas d’enquête policière, pas d’experts, pas de traque criminelle … ou si peu. Plusieurs meurtres sont commis, mais on perd la trace de leur auteur. La fuite est indispensable à Sophie pour échapper à cette malédiction qui lui colle aux basques. Elle va trouver des moyens subtils pour se fondre dans la masse et changer d’identité. Mais ce qu’elle ne sait pas, c’est qu’elle est sans cesse sous surveillance. Mortel combat secret, décrit de façon magistrale par celui qui devient chaque jour davantage le Maître – oh, je jeu de mot était trop tentant – du roman noir français.

Une construction méthodique, quatre parties qui s’emboîtent parfaitement, le crime vécu du point de vue de l’auteur comme dans la trilogie Verhoeven, un suspense haletant et une conclusion aussi inattendue qu’éblouissante. Un excellent roman, dans un style fluide et puissant. Un moment de lecture à part.

Robe de marié, thriller de Pierre Lemaitre, en Livre de Poche, 314 p., 6,60€