Bigmammy en ligne

08 janvier 2015

Au delà de la consternation, cherchons à comprendre

Un jour de deuil ... Certes. Une minute de silence, d'accord. Une marche citoyenne dimanche, bien entendu. Mais au delà de l'indignation, essayons de comprendre, cessons de nous mettre la tête dans le sable.

Film-de-Philippe-Faucon

Quand j'étais adolescente dans les années 60, personne ne parlait des persécutions subies par les Juifs pendant la guerre. Mes parents étaient revenus en France en 1945 après 14 années au Maroc puis à Alger. Ils n'avaient rien vu de cela. Cependant, notre professeur d'histoire nous a organisé au lycée une projection de "Nuit et Brouillard", le documentaire d'Alain Resnais sorti en 1955.

J'en ai fait des cauchemars pendant des nuits et des nuits et ce film a ouvert ma conscience politique à jamais, à la fois sur l'étendue de la capacité humaine à faire le Mal et sur les horreurs des totalitarismes. Des horreurs à grande échelle mais dans le principe identiques à celle de la tuerie d'hier, puisqu'on a délibérément tué des hommes à cause de ce qu'ils croyaient, pensaient, dessinaient.

Il y a quelques mois, en octobre 2012, est sorti un excellent film de Philippe Faucon, avec Rashid Debbouze et Yassine Azzouz : "La dés-intégration". On y décrit précisément le processus de radicalisation et de manipulation de jeunes hommes que tout pousse au désespoir. C'est glaçant. On frémit aujourd'hui à la lecture du C.V. des assassins présumés des journalistes de Charlie Hebdo.

On devrait reprogrammer ce film sur toutes les chaînes, comme le Téléthon. La cause est encore plus nationale car elle nous touche tous. C'est pour elle qu'il faut nous mobiliser au lieu ou en plus de descendre dans la rue.

Regardons-nous dans un miroir : qu'avons-nous fait concrètement comme efforts (nous les privilégiés, c'est à dire aussi tous nos gouvernements et nos responsables politiques, éducatifs, intellectuels, depuis 1962, droite et gauche confondus) pour intégrer à notre société et à l'économie nationale ces forces vives, inculquer les valeurs de liberté et de justice, d'égalité des chances à ces jeunes hommes nés sur notre sol mais qui s'en sentent exclus ? Car leurs soeurs, elles, s'en sortent beaucoup mieux : elle font ce qu'il faut pour se rendre libres par le travail et pour certaines, la réussite est brillante. Pour elles, la liberté d'aller et de venir, de se vêtir (et si elles veulent porter le voile, qu'on les laisse en paix !), de travailler et de se construire un avenir hors du carcan familial signifie vraiment quelque chose.

Ces criminels en fuite, on va les retrouver. Ils seront bientôt considérés comme des martyrs par une propagande entrant comme dans du beurre dans des âmes déjà perdues. Et après ?

 

Posté par Bigmammy à 11:30 - Actualité - Commentaires [7] - Permalien [#]
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Commentaires

  • Nos parents, et beaucoup étaient muets sur toutes les atrocités...j'ai vécu la guerre d'Algérie dans un quartier très conderné 'Batignolles/Epinette) et pour moi ce fut par Nuit & brouillard de Jean Ferrat que j'ai ouvert les yeux à la politique, de même que les livres de Christian Bernadac...

    J'ai vraiment pris conscience du problème de la guerre d"Algérie dans les années 80;car je cotoyais beaucoup d'algériens qui venaient se faire soigner en France & j'ai eu aussi l'occasion de connaître B Stora

    L'Histoire est la base de la mémoire

    Posté par Martine, 08 janvier 2015 à 12:25
  • Que pouvons-nous faire contre cette "puissance supérieure" qui dicte un radicalisme extrémiste à des esprits faibles ?
    Grâce à l'égalité des citoyens, tous ont accès à l'éducation; je ne crois pas que des jeunes de banlieue qui ont bibliothèques, moyens de communication et de transport, gratuits ou presque le plus souvent, soient moins gratifiés que certains jeunes de campagnes ou de montagnes reculées.
    En Langue du Sud, un tignous est quelqu'un qui résiste, qui ne s'en laisse pas compter, qui titille, mais toujours avec humour. C'est le patronyme d'un des martyrs de Charlie Hebdo.
    Alors soyons tous Charlie et tignous !

    Posté par Isabelle, 08 janvier 2015 à 12:44
  • Vous posez la bonne question "et après ?" Une chasse à l'homme s'intensifie, ils sont certainement épuisés, affamés si en croit les infos. Ils seront - c'est probable - abattus. Et après ? Combien d'autres derrière eux ? La culture et la parole sont essentielles.

    Posté par Armelle, 08 janvier 2015 à 14:28
  • J'ai été élevé dans la religion catholique aujourd'hui je ne crois plus pourquoi?
    Car toutes les religions aujourd'hui montrent cette intolérance, on l'a vu dans le mariage pour tous, on le voit avec les guerres au proche orient on le voit partout les gens se haïssent pour un dieu.
    Je suis Charlie car je veux que mes enfants vivent dans un monde de paix.
    Merci pour cette tribune

    Posté par myriam, 08 janvier 2015 à 14:35
  • Je vous lis souvent Big Mammy! Aujourd'hui,au milieu de la et de ma consternation, c'est sur votre blog que je trouve des questions qui me parlent, des infos, une vraie humanite ,une réflexion, des "et maintenant". Bravo, bravo et rebravo.
    44 ans, lectrice de Charlie, tricoteuse compulsive,( si ça existe) , et toujours pas bloggeuse....

    Posté par Miss petunia, 08 janvier 2015 à 22:51
  • En cogitant cette nuit...je me suis rappelée aussi avoir vu ce film et en ayant discuté avec une amie mariée à un algérien

    Posté par Martine, 09 janvier 2015 à 15:29
  • Nous étions pharmaciens, mon mari et moi, dans un quartier dit "sensible".
    Nos clients maghrébins étaient des gens adorables, et même s'ils ne s'intégraient pas vraiment -vêtements, prénoms des enfants, coutumes de "là-bas"- du moins vivaient-ils en bonne intelligence avec tout le quartier.
    Je ne compte plus les couscous et pâtisseries délicieux qui nous ont été offerts.
    Alors pourquoi leurs enfants, leurs petits enfants, pour certains, sont-ils devenus des loups enragés ?
    Je ne compte plus les vols, les agressions, les insultes subis à la fin de notre carrière.
    Qu'avons-nous fait ? Ou que n'avons-nous pas fait ?
    C'est en effet la question qu'il faut se poser.
    Et maintenant ?

    Merci Marie-Pierre.

    Posté par Marie-Laure, 10 janvier 2015 à 19:34

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