13 mars 2017
Fécamp : le délirant Palais Bénédictine
Farfelu, époustouflant, émouvant, le Palais de la Bénédictine est un édifice caractéristique du goût pour l’historicisme éclectique prévalant chez les industriels de la fin du XIXème siècle. Un témoignage de l’architecture industrielle. Et franchement, ce monument érigé à la gloire d’une liqueur vaut le détour et même le voyage jusqu’à Fécamp … C’est pourquoi nous l’avons fait !
Son commanditaire est l’industriel Alexandre Le Grand. Déjà, on imagine les parents de ce bébé lui décernant ce prénom lors de sa naissance en 1852 : la mégalomanie, ça s’hérite ! L’architecte choisi – Camille Albert - est celui de la ville de Fécamp, un disciple de Viollet-Le Duc.
L’élève va surpasser le maître (selon le fils du célèbre architecte lui-même) et exprimer de façon spectaculaire la vision de l’industriel pour un syncrétisme alliant commerce et art : ici, ce sera le style flamboyant entre néo-gothique et néo-renaissance. Un écrin pour les collections d’art ancien du propriétaire (peintures flamandes, piétas, ivoires ciselés, sculptures polychromes, documents d’époque et serrures compliquées) plus un outil industriel destiné à abriter les alambics et les foudres où macère et vieillit la production-maison : la Bénédictine.
On nous raconte évidemment que c’est à partir des recherches du moine bénédictin de l’abbaye de Fécamp, l’alchimiste Dom Bernardo Vincelli, que l’élixir secret aurait été mis au point en 1510. En 1863, Alexandre Le Grand, collectionneur d’art religieux, redécouvre la formule dans un ancien grimoire et réussit à reproduire la recette de cette liqueur.
27 plantes et épices sont nécessaire dont : angélique, ysope, genièvre, mythe, safran, macis, aloès, thé, arnica, coriandre, thym, citron, orange, miel, baies rouge, cannelle, clou de girofle, cardamome, muscade. Il faut environ 2 ans pour obtenir, dans le plus grand secret, le produit fini dont 96% est exporté dans le monde entier.
La coutume de terminer un plantureux repas par un verre de digestif est bien lointaine. Cependant, la Bénédictine entre aujourd’hui dans la composition de nombreux cocktails.
Un breuvage très doux mais qui titre tout de même à 40°, à essayer (mais avec modération) : dans un verre de tonic avec un zeste de citron, dans un verre de vin blanc mousseux ou de Champagne, pour corser un jus de pamplemousse, à la place du Whisky dans un café chaud surmonté de crème fouettée, avec du Brandy, dans la composition du Singapore Sling, avec du vermouth Noilly Prat rouge … La Bénédictine figure sur les étagères des bars du monde entier. Bien entendu, à l’issue de la visite, on vous invite à une petite dégustation, et on passe par la boutique …
Mais ce qui vous reste de ce voyage, c’est l’extraordinaire luxuriance du décor loufoque mais très « pensé », plus vrai que nature, dans le style « revival » conçu par Alexandre Le Gand et son architecte, qui évoque le souvenir perdu de la plus grande abbaye normande de Fécamp, vouée aux reliques du Précieux sang du Christ, recueilli par Joseph d’Arimatie et échoué sur le rivage de Fécamp, miraculeusement conservé au creux d’un tronc de figuier …
Une histoire tellement romantique.
En supplément, dans la colonne de droite, un diaporama.
Palais Bénédictine, 110, rue Alexandre Le Grand – 76400 Fécamp – ouvert tous les jours
Merci pour ce reportage. j'ai eu la chance d'effectuer un stage à la benedictine lorsque j'étais étudiante. Je traversais une partie de ces beaux bâtiments pour rejoindre mon bureau... La classe !