Monsieur & Madame Adelman, film de Nicolas Bedos
Brillant !
Un amour qui dure 45 années, un survol des dérives de la société bourgeoise de ma jeunesse, un hymne vibrant à la beauté et à l’intelligence d’une femme au sourire irrésistible, l’auto dérision d’un auteur velléitaire, mauvais amant, colérique, infidèle et redoutant plus que tout l’ennui …
Pour son premier film – mais ni son premier scénario, ni sa première pièce de théâtre à succès – Nicolas Bedos étonne et nous ravit. Même si on peut sans doute lui reprocher quelques longueurs (le film dure 2 heures), sa vision du couple provoque le rire, la réflexion, la tendresse. Le scénario, co-écrit avec sa muse, la sublime Doria Tillier, qui irradie le film, traverse les événements et les aléas politiques de plus de quatre décennies.
La salle rit souvent, les dialogues percutent, et tout y passe : le monde bourgeois, le microcosme littéraire, l’Académie française, les bobos mitterrandiens assidus de la psychanalyse, les intellectuels accros à la propriété, l’alcoolisme mondain et même les déceptions des pères vis-à-vis de leur fils moins doué (suivez mon regard …). Autant de tableaux vivants croqués sur le vif.
J’ai apprécié le casting : Jack Lang prononçant l’éloge funèbre de l’écrivain, Denis Podalydès en psychiatre subclaquant, David Foenkinos en chroniqueur littéraire, Pierre Arditi en noble patriarche réactionnaire affublé d’une épouse shootée au vin blanc (Christiane Millet), Nicolas Briançon en pédiatre désespérant, Zabou Breitman en directrice d’école … J’ai surtout beaucoup aimé l’ode à la judéité, l’hommage aux auteurs juifs américains : Saül Below, Philip Roth … Tellement encensés que Victor de Richemont choisit pour pseudonyme Victor Adelman, le patronyme de sa femme.
Un coup de chapeau aussi aux équipes de maquillage : c’est toujours bluffant de voir les héros vieillis sur ces fresques de tant d’années. On remarque toutefois que la transformation de Sarah demeure très superficielle. Car c’est elle, le personnage principal, elle qui mène la danse, tire les ficelles, restant dans l’ombre, se repaît des succès et des faiblesses de son mari, sa passion, sa chose …
Avec un rythme soutenu, des acteurs bien dirigés, des dialogues ciselés, Monsieur et Madame Adelman est un film drôle et puissant. On en redemande !