01 mai 2018
Cloître : quatre galeries et un jardin à Cadoin
Plaisir infini de visiter une nouvelle fois, et dans le plus grand calme, la superbe abbaye de Cadoin et son cloître magistralement restauré. Une halte de beauté niché au creux de sa vallée, à une petite heure de voiture de chez nous ... un prétexte pour réfléchir aux ravages du progrès technologique, dans les affaires de religion aussi ...
A cette abbaye cistercienne fondée au 12ème siècle fut confié une étoffe sacrée rapportée de la Première Croisade : le suaire ayant enveloppé la tête du Christ. Pendant huit siècles, cette relique attira à Cadoin, justement situé sur un des itinéraires du pélerinage de Compostelle, des foules de pélerins et tour à tour, tous les Grands du royaume. De quoi assurer la prospérité de la région.
Cependant, une expertise du tissu révèle en 1934 qu'il s'agit d'un voile réalisé sous le règne des Fatimides et dont les bordures invoquent Allah et font allusion au calife d'Egypte al Musta'li (1094 - 1101). Patatras, terminé le juteux pélerinage. Reste la magnifique abbaye romane (1119 - 1134) et surtout son cloître reconstruit selon le style gothique flamboyant au 15ème et 16ème siècle.
L'ensemble abbatial subira de terribles offenses pendant les périodes révolutionnaires, jusqu'à attirer l'attention du comte Charles de Montalembert et celle de Prosper Mérimée qui charge Abadie (architecte du Sacré-Coeur) de dresser un devis de réparations en 1860.
Clés de voûtes ornées, châpiteaux, marmousets, colonnettes ... le décor du cloître est ahurissant d'élégance et de diversité. Vraisemblablement l'oeuvre d'un atelier unique actif dans le Quercy et le Périgord à la fin du 15ème et au début du 16me siècle. Des comparaisons avec des scènes identiques ont pu être faites avec le cloître de Cahors commencé en 1504 (même voûtement à liernes et tiercerons, couronnements crénelés, niches couronnées de dais) et à Carennac.
Ce qui frappe, c'est la douceur de la couleur ocre de la pierre, le foisonnement et la précision des décors, les figures grotesques des marmousets aux mimiques explicites ... Un travail de dentelle remis en valeur par une récente restauration conduite avec respect et technicité. L'abbatiale romane, elle, est restée plus ou moins dans son jus et elle aurait besoin d'un sérieux coup de torchon ...
Une visite pleine d'enseignement, totalement envoûtante (sous croisée d'ogive, naturellement !).
magnifique !