25 février 2019
La Favorite - film de Yourgos Lanthimos
Anne, dernière reine de la dynastie Stuart, souffrant de la goutte, obèse, vraisemblablement atteinte des séquelles d’un AVC, est trimballée la plupart du temps dans un fauteuil roulant.
Elle qui a perdu les 17 enfants dont elle a été enceinte vit au milieu d’autant de lapins qui portent les prénoms de ces vies perdues. Elle a règné sur l’Angleterre de 1702 à 1714, à l’époque de la guerre de Succession d’Espagne sur le continent, aux prises avec les armées de Louis XIV, et son meilleur atout est, jusqu'en 1710, Lord Marlborough.
La reine – versatile, sournoise, influençable - s’en remet à sa confidente, Lady Sarah Chruchill, duchesse de Marlborough, qui décide à sa place des budgets militaires comme des Premiers ministres … jusqu’à l’arrivée d’une de ses lointaines cousine, Abigail, perdue jadis au jeu par son père aristocrate et ravalée désormais au rang de servante …
Mais Abigail est ambitieuse, elle a reçu une solide éducation et connaît les bonnes manières ; elle va se rendre indispensable à la reine Anne, jusque dans son lit, puis évincer sa bienfaitrice et réussir à se faire épouser pour revenir dans les rangs de l’aristocratie.
Un film prenant, aux décors somptueux et aux costumes réalistes, aux lumières fuligineuses, superbement interprété par trois comédiennes sensibles : Olivia Colman (que l’on avait appréciée dans la série TV britannique Broadchurch en inspectrice de police), Rachel Weisz, l'impitoyable Lady Sarah - portraiturée ici à droite - qui se fait octroyer par la reine le domaine de Blenheim en récompense des victoires de son mari, et surtout la guerrière insoumise Emma Stone, en sulfureuse et irremplaçable femme de chambre très personnelle de la reine, Abigail Masham, dénuée de tout scrupule pour arriver à ses fins.
Le jeu des influences, les arcanes de la lutte pour le pouvoir entre favoris d’un monarque, on l’avait déjà vu … mais pas encore entre des femmes.
C’est un film un peu long – 2 heures – naturellement baroque, avec la musique qui va avec - mais on est happé par l’originalité de la mise en scène (courses de canards ou de homards – un clin d’œil du réalisateur ! - ou une danse de salon très rock and roll) ...
Pour Olivia Coleman, avec ce rôle aussi ingrat que magnifique, l'Oscar de la meilleure actrice décerné cette nuit est largement mérité.
Beaucoup aimé aussi. Très bon week end.