Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Bigmammy en ligne
Bigmammy en ligne
Bigmammy en ligne

Journal de bord d'une grand-mère grande lectrice et avide de continuer à apprendre, de ses trois filles et de ses 7 petits-enfants.
Voir le profil de Bigmammy sur le portail Canalblog

Newsletter
Archives
Derniers commentaires
8 juillet 2019

Rugby, palombes, cercles, l'art de créer du lien : essai de Bernard Traimond

Rugby Palombes Cercles

Bernard Traimond, anthropologue né à Soustons en 1944, réédite ici quelques éléments d’une thèse de troisième cycle soutenue à L’EHESS en 1983, qui porte sur la société rurale landaise et ses formes spécifiques de sociabilité dans un terroir pauvre, isolé, difficile.

Des matériaux scientifiques, fondés sur des archives, avec tout ce qui caractérise ces éléments : la réalité historique, certes, mais aussi l’intérêt biaisé de ceux qui relatent ces événements (rapports de police, jugements …).

Trois types de liaisons sociales spécifiques aux Landes : les assurances de bétail, qui ne servent pas seulement à assurer le bétail, la création des cercles avec leur évolution sociologique et la suspicion qu’ils suscitent de la part de l’administration, la création des équipes de rugby … dérivé non pas de la soule, mais du jeu de la barette.

On note que les clubs de rugby se forment autour d’intérêts communs auxquels la politique n’est pas totalement étrangère. L’accord entre certains radicaux et propriétaires en faveur de la paix sociale après les vagues de grèves des résiniers par exemple. Cependant, les curés, plus favorables au football, s’opposent au rugby pour éviter que les enfants ne « se touchent » … Ainsi, rugby et baignade sont bannis des séminaires.

Toutes ces formes de réunions ont des points communs : les agriculteurs comme les femmes y sont sous ou pas du tout représentés. Car le statut des femmes s’aggrave entre le XVIIIème et le XIXème siècle. Auparavant, elles partageaient une grande partie des activités des hommes (récoltes, corvées, cabaret …), puis elles sont renfermées avec leurs enfants à partir de 1850.

Autre institution emblématique de la région, exclusivement réservée aux hommes : la chasse à la palombe. La grande chasse commence à la Saint Michel (29 septembre) et dure plus d’un mois. Les appeaux, soigneusement élevés depuis l’année précédente, nourris à la becquée soir et matin, encapuchonnés, placés en haut des pins étêtés, appellent leurs congénères. Mais la récolte est maigre. La palombière, c’est une mythologie, une symbolique, un rituel d’une évidente inefficacité … et pas du tout un massacre !

Dernier chapitre qui résonne avec les mouvements de protestation récents sur les ronds-points : les révoltes du XIXème siècle, qui ont toutes pour objectif d’obtenir une meilleure répartition des récoltes entre propriétaires et métayers ou la lutte contre  les agents de la répression de la contrebande de tabac. Les modes d’intervention ressemblent à ceux d’aujourd’hui : rassemblement en masse, envahissement des bourgs – où demeurent les propriétaires – blocage des accès : dans la manifestation, hommes et femmes unis, tous ensemble, expriment la force dans sa forme la plus accomplie.

Une analyse de modes d’intervention qui constituent autant d’expression de la sociabilité d’une région qui m’est chère, en complément de l’ouvrage magistral de Jacques Sardos « Histoire de la forêt landaise », du désert à l’âge d’or, dont je recommande aussi la lecture.

 

Rugby, palombes, cercles, l’art de créer du lien, la sociabilité rurale landaise, par Bernard Traimond, éditions Cairn, 212 p., 20€

 

Commentaires
Pages
Visiteurs
Hier 661
Depuis la création 7 282 843