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Journal de bord d'une grand-mère grande lectrice et avide de continuer à apprendre, de ses trois filles et de ses 7 petits-enfants.
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10 août 2020

Fascisme français, ouvrage collectif sous la direction de Serge Berstein et Michel Winock

 

fascisme

Il était une fois un universitaire israélien historien des idées  - Zeev Sternhell (1935 – 2020) - dont la famille avait été massacrée durant la Shoah et qui a fait ses études en France – ayant fait toute sa carrière sur l’étude des partis et mouvements de Droite en France.

Sa thèse infiniment ressassée est de considérer que la France, dès les années 1880 et bien avant le début de la guerre de 1914, avait eu non seulement l’idée, mais encore le mouvement de masse fasciste, celui du Colonel de La Roque, si puissant entre les deux guerres, bref, que la France, bien avant Mussolini et sa Marche sur Rome, fut le berceau du fascisme.

Ce livre est un recueil d’articles d’un groupe d’historiens prestigieux qui réfutent cette thèse « idéalisée » voire truquée, et fournit une contreproposition à cette assertion, tant sur le fond que sur la forme.

Aux trois droites françaises décrites par René Rémond – légitimiste, orléaniste et bonapartiste – Sternhell ajoute une « droite révolutionnaire » sans unité organisationnelle mais caractérisée par un objectif commun : l’instauration d’un ordre nouveau. Avec pour corollaire l’antisémitisme de masse, le boulangisme, les ligues antidreyfusardes. Des idées qui répondent à la crise du libéralisme.

Sternhell donne sa définition du fascisme : un système de pensée produit de la symbiose entre le nationalisme organique et le socialisme antimarxiste, une idéologie révolutionnaire qui s’oppose radicalement à l’ordre des choses existant et à la civilisation libérale et dont l’essence est le totalitarisme. Le fascisme se propose comme une nouvelle religion politique où combattre est une fin en soi, avec la détestation de l’individualisme et de l’esprit des Lumières.

Sternhell s’oppose donc à la quasi-totalité des historiens spécialistes du XXème siècle et en particulier au « clan » de l’Institut d’Etudes politiques de Paris. La pléiade de chercheurs dont les contributions sont ici réunies nous éclaire sur les faiblesses structurelles d’une thèse qui est une illustration éclatante du principe téléologique : « tout ce qui est arrivé devait arriver ». La méthode, les références, les archives uniquement sélectionnées selon leur sens favorable à la thèse, les preuves de la thèse de Sternhell ne répondent en aucune façon à la rigueur de la recherche historique. Le regard rétrospectif de l’histoire tourne chez lui à la fatalisation rétrospective des événements.

Ceci étant, et malgré le caractère parfois ardu de l’ouvrage, j’y ai découvert des aspects de notre histoire largement passés sous silence, par exemple : les caractéristiques du boulangisme, les stéréotypes antisémites qui constituèrent un patrimoine idéologique commun à la droite nationaliste et à l’extrême gauche comme à une partie de la gauche républicaine (tiens, tiens, tiens …), la vraie nature républicaine et résistante du colonel François de La Roque, qui rassemblait plus d’un million de partisans et fut un correspondant régulier de l’Intelligence Service pendant la guerre, surtout des anciens combattants et de nombreuses femmes, et une dernière « pépite » :

Comme le nazisme ne répondait pas aux critères du fascisme définis par Sternhell, il l’exclut du champ des fascismes tandis qu’il élargit démesurément la catégorie pour y inclure des individus qui ne se reconnaissent pas comme tels.

A la fin, Sternhell fait l’éloge du « marxisme humaniste » avec l’espoir d’un socialisme capable de se mesurer aux dures réalités de notre temps. Vaste programme !

Bref, ces controverses d’experts – historiens comme professeurs de médecine – me laissent sans voix ! Mais effectivement, répéter sans cesse une idée erronée ne la fait pas devenir juste pour autant …

 

Fascisme français, ouvrage collectif sous la direction de Serge Berstein et Michel Winock, réédition en 2020 de l’ouvrage original publié en 2014 pour la première partie, Editions Perrin, collection Tempus, 426 p., 10€

 

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