12 mars 2022
La malédiction de Rocalbes, polar historique de Philippe Grandcoing
Cette nouvelle enquête du duo de choc Hyppolyte Salvignac et Jules Lerouet nous transporte en 1910 au bord escarpé des rives de la Vézère, et plus précisément au village des Eyzies de Tayac, où depuis quelques années se succèdent les découvertes de vestiges des premiers temps de l’humanité.
Un bouleversement dans ce coin tranquille où viennent désormais séjourner anthropologues, pilleurs de grottes, collectionneurs de silex taillés (authentiques ou fabriqués ...), et aussi archéologues avides de butin.
Comme toujours, ce roman à suspens mêle des personnages historiques – Célestin Hennion, patron de la Sureté à Paris, Otto Hauser, trafiquant de découvertes préhistoriques, hôtelier et homme d’affaires, un citoyen suisse que tout le monde prend pour un prussien honni, Denis Peyrony, l’instituteur découvreur de plusieurs sépultures néandertaliennes à nos romanesques héros.
On retrouve avec plaisir dans cette cinquième aventure le subtil dilettante Hippolyte et l’ardente Léopoldine, sa compagne féministe qui se refuse au mariage officiel. Cependant, elle a tapé dans l’œil d’Aristide, le père d’Hippolyte, jadis notaire à Martel (Lot). Celui-ci s’est soudain mis en tête d’acquérir un domaine en Périgord pour assurer à son fils un revenu plus stable que la location de sa boutique d’antiquités du passage du Grand-Cerf.
C’est un de ses anciens clercs établi à Sarlat, qui lui présente le château de Rocalbes, une demeure laissée dans un relatif abandon mais surplombant fièrement la falaise, mise en vente par le dernier fils d’une famille complètement ruinée. Aristide Salvignac flaire une bonne affaire, alors qu’une série de meurtres viennent bouleverser la vie simple de cette contrée trouée des premiers abris de nos ancêtres.
Il n’est pas indispensable d’avoir en mémoire les quatre précédents épisodes de la saga des Salvignac pour se plonger dans cette ambiance pleine de mystères. Les paysages : cette roche ocre, surplombée d’un chapelet de châteaux médiévaux sous lesquels on trouve immanquablement des grottes (Bonaguil, Cuzorn pour ceux que je connais), le vent du progrès scientifique soudain : journalistes, scientifiques, touristes qui viennent perturber la vie paisible et difficile des ruraux dans le pays de Jacquou le Croquant, le roman d'Eugène Le Roy incarné à l'écran par le regretté Gaspard Ulliel, et parfois les enrichir lorsqu’ils louent un pré pour y effectuer des fouilles, mais aussi les manœuvres louches d’affairistes sans scrupules allant jusqu’au meurtre.
Il ne faudra pas moins que l’habileté et le courage de Jules Lerouet, efficacement secondé par Hippolyte pour déjouer la malédiction du château de Rocalbes.
Chaque fois que je referme une telle aventure – qui se déroule ici à quelques kilomètres de ma maison de Lot-et-Garonne – je culpabilise : j’imagine quel travail de documentation et d’écriture il a fallu à l’auteur pour agencer cette intrigue particulièrement complexe, alors que je l’ai dévorée en moins de deux jours.
La malédiction de Rocalbes, polar historique de Philippe Grandcoing, aux éditions de Borée, collection « Vents d’histoire », 310 p., 19,90€