Après nous avoir conté les enquêtes Frank Stave inspectant en 1947 dans les décombres de sa ville de Hambourg bombardée, Cay Rademacher (né en 1965) change totalement de registre.

Son nouveau personnage central se situe de nos jours et en France. C'est le capitaine de Gendarmerie Roger Blanc, qui vient d’être muté dans une petite brigade de Provence, tout à côté de l’étang de Berre …

Jusque-là, il était spécialisé à Paris dans les affaires de corruption politico-financières, et il a dû déranger un peu trop haut, un peu trop fort. Mais quand on est militaire, on obéit aux ordres. Et il rejoint sa nouvelle affectation dans un secteur, que lui, homme du nord, qui frise la quarantaine, ne connaît absolument pas. Et en plus, sa femme vient de le quitter …

C’est donc à la fois une épreuve d’adaptation, une incursion en terrain inconnu, au sein d’une équipe qui se demande pourquoi on lui affecte un Parisien, une arrivée dans une maison quasiment en ruine jadis héritée d’un vieil oncle.

La solitude, l’hostilité à peine voilée de son commandant, la découverte d’un environnement géographique et culturel déconcertant, au milieu d’un marigot d’influences, telles qu’on les imagine dans ce Midi dangereux autant que superbe. L'étude psychologique du héros déchu est précise, on perçoit les affres du déracinement.

Dès son arrivée, on confie au capitaine une enquête sur un meurtre : un individu haï de tous, délinquant violent à la petite semaine, est retrouvé abattu d’une rafale de kalachnikov et carbonisé dans une décharge. Un règlement de comptes entre dealers de Marseille ? pas si certain.

Blanc s’y attèle avec son coéquipier désigné … avec lequel aucun autre de ses collègues gendarmes ne souhaite travailler. L'homme porterait la poisse ... Ils vont néanmoins former une équipe avec l’informaticienne de la brigade, Fabienne, sous l’œil vigilant du commandant.

Car l’enquête se corse, si on peut dire … Dans cette région, tout le monde se connaît, les liaisons extra-conjugales sont fréquentes mais tout le monde est au courant, les affaires immobilières suscitent bien des interrogations, et le parti au pouvoir ne tient pas à céder la place à l’éternelle candidate du Front National. Car on est en période électorale.

Cay Rademacher, écrivain allemand de talent aujourd'hui installé avec sa famille en Provence, nous renvoie une vision bien sombre des liaisons dangereuses des politiques, des entrepreneurs et des mafieux locaux. L’intrigue est foisonnante, pleine de découvertes et de rebondissements.

Le capitaine Blanc va naturellement s’en sortir, mais après une scène finale flamboyante … mais on reste tout de même un peu sur notre faim sur la fin ... histoire de penser au prochain épisode, dès qu’il sera traduit.

Le mistral meurtrier (Mörderischer mistral, Ein Provence-krimi mit Capitaine Roger Blanc), polar de Cay Rademacher traduit de l’allemand par Georges Sturm, aux éditions du Masque, 319 p., 8,50€