11 août 2023
Le petit Chose, roman d'Alphonse Daudet (1866)
"Un classique est un livre qui n'a jamais fini de dire ce qu'il a à dire ... Un classique est une oeuvre qui provoque sans cesse un nuage de discours critiques, dont elle se débarrasse continuellement." Italo Calvino dans Perché leggere i classici - 1991.
Les vacances en famille donnent l’occasion de découvrir des livres oubliés … comme cette collection des œuvres complètes d’Alphonse Daudet (1840 – 1897), livres reliés cuir datant de 1899 et édités chez Alexandre Houssiaux, illustrées de gravures à l’eau-forte protégées par un ultra-mince feuillet de papier transparent.
Dix-huit tomes en tout, un casier plein de ma bibliothèque, jamais ouverts jusque-là. Un legs de mon père … En réalité, j’avoue ne jamais avoir lu un ouvrage de Daudet, à part quelque contes archi-connus comme La chèvre de Monsieur Seguin ou Tartarin de Tarascon … On m’avait recommandé à l'adolescence, de lire Le petit chose, mais, comme toujours, j’avais éludé la consigne, comme jadis, Eugénie Grandet.
C’est donc ce premier roman, publié en feuilleton dès 1866 dans le Moniteur puis chez Hetzel en 1868, un roman d’apprentissage, qui lance vraiment la carrière du jeune auteur. Il y raconte ses souvenirs de jeune intellectuel dont la famille a été ruinée et qui doit travailler comme pion dans un collège.
Déjà, les phénomènes de harcèlement scolaire, la bonté de quelques personnages mais la cautèle d’autres. Cependant, le jeune Daniel est toujours sauvé au pire moment par des âmes généreuses …
Malgré le ton particulièrement larmoyant de ce garçon affublé d’une taille trop petite, et qui sans doute de ce fait restera toujours un enfant – le fameux syndrome de Peter Pan, le livre ne m'est pas tombé des mains ...
Malgré le sentimentalisme exacerbé de cette âme influençable, irrésolue, soumise, malgré le racisme pur et dru, je ne puis m’empêcher d’apprécier le style, la description des personnages souvent pleine d'humour – c’est la même société que Zola – et j’ai suivi le scénario avec attention.
C’est cruel, vachard, mélodramatique et sentimentaliste à souhait, mais donne une description lucide de cette petite bourgeoisie de province et des aléas du commerce, un tableau terriblement réaliste d'une société en pleine mutation technique et politique …
Pour ma part, et sans l’avoir jamais connu, j’ai pensé à mon grand-père paternel, ruiné après avoir vendu son entreprise de peinture par l’acheteur qui ne l’a jamais payé et obligé de déménager et de retravailler comme ouvrier à près de 70 ans … et qui se suicida.
J’ai donc apprécié cette plongée dans la lecture d’un autre siècle, et même commencé le deuxième roman de l’auteur … dont les idées réactionnaires m’effraient pourtant, et qui est mort jeune et syphilitique. Nobody is perfect !
Le petit Chose, en Livre de poche, 352 p., 4,80€
A.Daudet
Quand on aime la Provence on ne peut qu' aimer Alphonse Daudet qui a su nous parler de cette région avec beaucoup de sensibilité, avec beaucoup de poésie.
Mais l'indiviu est gâché par son antisémitisme. Faut-il alors séparer l'homme de son oeuvre? Il en est de même pour L-F Céline.