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Journal de bord d'une grand-mère grande lectrice et avide de continuer à apprendre, de ses trois filles et de ses 7 petits-enfants.
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2 août 2008

François CAILLETEAU : Gagner la Grande Guerre

Claude et moi avons lu ce livre sur les ressorts de la Grande guerre. Il est essentiel pour comprendre comment nous vivons l'Europe et le monde d'aujourd'hui. Malgré le sujet à première vue assez austère, je vous engage à vous le procurer...

Les ressorts de la Grande GuerreGrande_Guerre

La guerre commencée en 1914 a dominé le XXème siècle : elle ne s’est que provisoirement interrompue en 1918, pour reprendre, avec les mêmes protagonistes, plus le Japon, 21 ans plus tard.

François Cailleteau nous explique pourquoi les Alliés, France, Royaume Uni, Etats-Unis ont fini par « Gagner la Grande Guerre »[1]. Il le fait avec la rigueur scientifique de l’historien, mais aussi, et c’est toute l’innovation de ce livre, avec l’expérience du combat d’un officier d’infanterie, et la compétence économique, financière et organisationnelle d’un contrôleur général des Armées et d’un inspecteur des Finances

Et tout d’abord, il répond à la question que nous nous posons tous sur la guerre de 14 : pourquoi des chefs d’Etats sensés se sont-ils lancés dans cette aventure sanglante ? Parce que chaque camp croyait à la « bataille décisive », détruisant l’adversaire en quelques semaines ou au pire en quelques mois. Les Allemands pouvaient d’ailleurs se prévaloir des précédents de 1866 contre l’Autriche-Hongrie et de 1870 contre la France.

Mais aucune percée n’aura lieu, ni allemande, ni alliée, ni en 14 (Belgique, Marne), ni en 15 (Somme), ni en 16 (Verdun), ni en 17 (Chemin des Dames), ni en 18 (Somme). Pourquoi ? Pour une raison que François Cailleteau analyse de façon lumineuse : certes, les moyens humains et matériels, et l’engagement, étaient considérables, des deux côtés, mais cette guerre s’est déroulée sans « arme de rupture », capable de rompre le front en profondeur, en exploitant rapidement une faiblesse temporaire de l’adversaire – ce qu’était la cavalerie lourde jusqu’à l’entrée en scène de la mitrailleuse et des canons légers, ce que seront en 1940 les chars. Toutes les offensives, quelles qu’en soit l’effroyable prix, se sont enlisées à quelques kilomètres de leur point de départ. Il a donc fallu « tenir », dans le réseau de tranchées qui courait, à l’Ouest, sur 1800km, de la Manche à la frontière suisse. Pour espérer gagner, il fallait avoir moins de pertes que l’ennemi, trouver des alliés, et maintenir un moral élevé.

Au chapitre des pertes, l’auteur nous livre une information essentielle, et peu connue des français : pendant tout le conflit, les pertes allemandes ont été moins lourdes que les pertes françaises et britanniques : jusqu’en 1915, celles-ci ont même été le double des pertes allemandes, rejoignant ensuite des taux de 1,20 à 1,50 selon les périodes. L’auteur tente d’expliquer ce grave problème, en premier lieu par la différence des niveaux d’entraînement et d’encadrement : l’armée allemande est plus jeune (compte tenu de la meilleure démographie de l’Empire), et mieux encadrée, notamment en sous officiers (110.000 sous officiers en Allemagne contre 58.000 en France). Second handicap français : l’artillerie, moins adaptée, et moins bien utilisée ; enfin, la conception des abris, beaucoup moins « bétonnée » que du côté allemand.

Trouver des renforts est la deuxième condition de la victoire, et, sur ce point, les alliés de 1914 ont été plus efficaces que l’Allemagne, en faisant entrer l’Italie, puis les Etats-Unis dans le conflit. François Cailleteau démontre comment les erreurs politiques imposées par l’Etat Major allemand, notamment la guerre sous marine à outrance (attaque des navires neutres) pèseront dans le choix américain, alors même que le neutralisme avait prévalu pendant 3 ans (1914-1917). Les alliés ont su également, mobiliser toute leur population, y compris dans leur Empire colonial (Afrique du Nord et Afrique Noire, Dominions britanniques).

Tenir : François Cailleteau analyse toutes les chutes de moral des belligérants, et remarque que, finalement, les démocraties (Grande Bretagne, Royaume Uni, Etats-Unis) sont parvenues, mieux que les régimes plus ou moins autocratiques (Empires allemand, russe et autrichien), à maintenir la cohésion et l’envie de vaincre. Face aux démocraties militairement victorieuses, les autocraties basculent dans la révolution, et les totalitarismes préparent le piège de la Seconde guerre mondiale.

En tout cas, ce livre mérite d’être lu par qui s’intéresse à l’histoire de l’Europe 

 


 

[1] Editions ECONOMICA, 207 pages, 23 €

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