Emil Nolde
Il était grand temps ! Nous avions raté cette exposition à Paris. Nous ne l'avons pas laissée passer à Montpellier, au Musée Fabre jusqu'au 24 mai....
Je suis fana des expressionnistes allemands et Emil Nolde en est une figure majeure.
Né dans le Schleswig à une époque où, au gré des conflits mondiaux, cette province du nord passe de l'Allemagne au Danemark, cet artiste, contemporain de Matisse qu'il admire en secret, apprend la sculpture sur bois, la gravure, enseigne les arts décoratifs, vient étudier à Paris à l'académie Julian. Il aime van Gogh, Millet, Manet, Rodin, Daumier...Il fait un bout de chemin avec le mouvement "Die Brücke", peint les couleurs de la mer, les nuits de Berlin, le Christ....Sa relation avec le régime hitlérien est complexe : attiré, compagnon de route, puis rejeté, banni, interdit de peinture. Il se rabattra vers ce qu'il appelle son oeuvre "non peinte" - aquarelles, gravures sur bois, lithographies - d'un trait précis et fort. A voir au deuxième étage du Musée Fabre.
L'exposition est chronologique et didactique. Les premières oeuvres éclaboussent de couleurs la toile, à coup de touches puissantes et resserrées, très influencées par les post-impressionnistes ou Van Gogh. Ensuite, la tendance se fait de plus en plus fauve et les portraits violents, la lumière de dessous éclairant de grands a-plats verts les visages convulsés. C'est là que l'on peut comprendre que ce style provocateur a pu susciter chez les censeurs nazi le classement de la peinture d'Emil Nolde parmi l'"entartete Kunst", l'art dégénéré.
Une mise en scène de 90 peintures et 60 dessins, un survol de soixante ans de créations dans une période où l'artiste a vécu deux guerres. Juste de quoi vous donner l'envie d'aller jusqu'à Seebüll pour admirer les peintures de la fondation Nolde et en particulier le tryptique du Martyrium exposé à la place de "Das Leben Christi" actuellement à Montpellier.
Ne pas oublier non plus de terminer la visite par quelques merveilles de ce musée moderne et confortable : quelques superbes Manet, Monet, Berthe Morizot, Frédéric Bazille et Gustave Courbet.