Si on m’avait dit, lorsqu'en février dernier je commençais cette espèce de chronique de la pandémie, que nous allions tous rester confinés pendant six semaines - et peut-être plus - j’aurais grimpé aux rideaux, sans y croire une seconde.

Ce que nous vivons en ce radieux printemps 2020, personne ne l’a vécu auparavant, nulle part. Une économie à 45% passée en mode « silencieux », des limitations drastiques de la liberté fondamentale d’aller et de venir, les écoles fermées, un système de santé totalement focalisé sur une seule pathologie, des perspectives d'endettement public sur des décennies …

Bref, une guerre non pas froide, mais impalpable, sans bombardements, sans exactions, sans tranchées, menée contre un ennemi inconnu et invisible mais parfois mortel, qui frappe au hasard ou presque : les riches comme les pauvres, les gens ordinaires comme les célébrités, surtout les vieux mais pas que … Tandis que dehors, le printemps éclate, le ciel bleu nous nargue, on entend les oiseaux chanter au coeur de Paris aux rues désertées …

Et on voit apparaitre les comportements les plus extrêmes : les altruistes qui ont soigné des malades jusqu’à y laisser la vie, des solidarités insoupçonnées, des soignants héroïques, des enseignants qui déploient des trésors d’ingéniosité pour garder le contact avec leurs élèves mais aussi hélas des salauds anonymes qui veulent expulser de chez eux des infirmiers au contact des malades ou crèvent leurs pneus, l’accroissement des violences conjugales, les récidivistes des promenades hors créneaux horaires autorisés …

On peut tout de même encore aller faire ses courses de « première nécessité » - mais pas acheter de livres ! A Paris, ce n’est pas vraiment une sinécure et les prix grimpent puisqu’on ne dispose plus des importations à bas coût, et qu’on est « contraint » de se servir auprès des commerces de proximité. Comme les clients achètent pour plusieurs jours, le service est plus lent et on fait des queues de plusieurs dizaines de mètres à l’extérieur …

La question fondamentale est de savoir « jusqu’à quand ? ».

Adieu déjà les vacances de Pâques, adieu toutes les fêtes prévues pour ce deuxième trimestre, adieu sans doute une foule de festivals d’été, les Jeux Olympiques, les matches de foot … J’ai une pensée émue pour les couples qui avaient programmé leur mariage ou toute autre célébration familiale, aux étudiants en stage à l’étranger encore bloqués (mais je sais que des opérations de rapatriement sont en cours) …

Comment allons-nous en sortir ?

C’est là que notre personnel politique devra faire preuve d’inventivité et de courage. Il leur en sera tenu compte. Comment faire pour compenser les pertes de chiffre d’affaires des innombrables entreprises pour lesquelles la cessation forcée d’activité est sans retour. Des crédits publics, certes … mais un jour ou l’autre, il faudra rembourser !

Des éléments d’optimisme peuvent aussi nous rassurer : le système bancaire tient bon, l’argent est abondant au niveau international, c’est pourquoi les taux d’intérêts sont si bas. L’épargne disponible peut être mobilisée à moyen ou long terme, on peut faire appel aux épargnants en leur proposant des conditions de rémunération attractives … Mais il va falloir y aller de façon massive et abandonner les politiques classiques d’austérité budgétaire qui ont affaibli les pays du Sud. Déjà, péniblement, l’Europe s’y résout. Nous changeons de monde économique, il faut sauver nos entreprises, et pas seulement les nôtres puisque le monde entier est interdépendant dans l’horreur.

Donc, l’urgence est de continuer à freiner – autant que faire se peut – la circulation du virus, chacun à son niveau, afin de desserrer l'étau des services de réanimation. Cesser de râler, prendre son mal en patience en croisant les doigts, rester à la maison, apprendre à cuisiner et tester de nouvelles recettes, méditer, écrire, pratiquer le yoga, s’évader pas la lecture.

Quant à moi, je gère mes stocks au plus juste : le café, les sacs poubelle, le shampoing, le savon, la lessive, le papier toilette, le beurre et les œufs … On a la chance de ne pas être isolé du reste du monde : la télévision, l’internet, le téléphone avec visioconférence et le contact avec mes filles et leur famille …

Il y a bien des façons de passer le temps ! 

J O Y E U S E S   P Â Q U E S !