09 mars 2009
Valadon-Utrillo, exposition à la Pinacothèque de Paris
Belle, très belle, Suzanne Valadon (de son vrai nom Marie-Clémentine Valade, 1865 – 1938) fut acrobate avant d’être modèle et amante de grands maîtres tels Renoir, Puvis de Chavanne, Degas, Toulouse-Lautrec, Henner, Eric Satie aussi. La belle fille de « La danse à la ville », ou « La danse à la campagne » de Renoir, c’est elle !
Fille-mère à dix-huit ans, elle va passer de la pose à la palette, apprenant très vite de ces maîtres et acquérant un style bien à elle, entre symbolisme et fauvisme. Son fils, c’est Maurice (1883-1955), un pauvre enfant chétif et colérique, bientôt éperdu de boisson et séjournant dès sa jeunesse en institution psychiatrique. Il sera reconnu par un espagnol de rencontre, Utrillo et signera ses peintures de « Maurice, Utrillo, V ».
Autodidacte lui aussi, il bénéficie des conseils de sa mère mais demeure loin de la palette chaude de Suzanne : il représente uniquement des paysages tristes, de préférence les rues de Montmartre, mélangeant le plâtre à sa peinture.
Ses premières oeuvres « sur le motif » s’apparentent à l’impressionnisme. Il peint sur du carton. Il produit en masse, pour étancher sa soif d’amour et de vin…..se lie d’amitié avec un jeune peintre, André Utter (ci-dessous avec ses chiens). Celui-ci rencontre Suzanne : elle s’en amourache et malgré les vingt ans d’âge qui les séparent, en fait son compagnon, une blessure pour Maurice qui se sent trahi par cette mère absente.
Cela me fait penser à Henriette, ma grand-mère paternelle, si belle aussi, qui épousa en seconde noces un jeune homme plus jeune encore que son fils Jean, mon père.
Maurice Utrillo connaît le succès pendant toute sa « période blanche » - entre 1910 et 1916 - ensuite, sombrant dans l’alcool, il peindra en série non plus sur le motif mais d’après des cartes postales, des paysages urbains désespérément vides. Aucun personnage, sinon de vagues silhouettes tournant le dos au peintre. Des façades lépreuses vues sous différents angles, des églises de banlieue, des cabarets….
L’expo a pris le parti de ne montrer aucune des œuvres de la fin de carrière, Maurice Utrillo survivant pourtant jusqu’à l’âge de 73 ans…
Au moment où le talent de son fils s’éteint, Suzanne Valadon recommence à peindre : des portraits, des natures mortes, des nus, des à-plats de couleurs chaudes soulignées d’un trait sombre, sans repentir.
L’exposition croisée montrée à la Pinacothèque de Paris présente (jusqu’au 15 septembre) une centaine d’œuvres de la mère et du fils entremêlées, avec de judicieux panneaux d’explications particulièrement intéressants. Une révélation pour moi en ce qui concerne Suzanne Valadon, bien moins connue que son fils.
Il faut y courir avant que la rumeur ne rende cette visite difficile : c’est petit, la Pinacothèque, pour le moment la queue est supportable – quoique l’on doive attendre en plein air sur le terre plein de La Madeleine – dans quelques semaines, tout Paris courra vers l’événement.
Commentaires
Bonjour, j'espère que vous aimerez comme moi cet extrait du roman "Le Bonheur" de Marc-Edouard Nabe, 1988.
Le personnage principal, l'artiste peintre Andréa de Bocumar (anagramme de MEN), donne une interview radiophonique où il parle des génies méconnus de leur vivant : Van Gogh, Modigliani, ... et de ceux dont le succès vécu à affaiblit le talent : Picabia, Chirico, Severini, Utrillo.
[Utrillo,] "dont le génie s'étiole, toute gloire bue...
l'I. : Vous n'aimez pas Utrillo ?
A.d.B. : Si, beaucoup, mais il y a eu vraiment chez lui Mister Star et Docteur Maudit ! Le dernier Utrillo, entre la grosse Valore et Jeanne d'Arc, passant des heures dans sa chapelle privée à embrasser des reliques avant de peindre de faux Utrillo, n'est pas celui dont sa maman était fière, le roi des cieux parisiens, le maçon des murs pisseux ! Poule tremblotante aux oeufs d'or, enfermé, exploité à fourbir des Montmartres en série, Utrillo est l'exemple type du maudit qui a raté sa malédiction, il était fait pour crever de cirrhose à 30 ans comme les autres... Il a préféré se marier que mourir...
L'I. : Ah, bon ? Pour vous alors, la femme est nocive à l'artiste ?
A.d.B. : Non, pas forcément. Sans sa mère, Utrillo n'aurait jamais peint.
L'I. : Mais sans sa femme il aurait continué, c'est ça ?
A.d.B. : (Rires) Exactement !
[fin de l'extrait]Drôle....
Moi, je me souviens bien d'avoir vu Utrillo, à la télé, encensé par le Tout Paris dans ses dernières années qui furent pourtant les pires du point de vue artistique. Ce qui est surprenant c'est qu'il ait vécu si longtemps. Comme quoi, l'alcool conserve.
J'ai visité votre blog. Sérieux, et surprenant aussi : la mise en lien du blog de Pierre Bilger : là, c'est du lourd !Merci de votre visite
Vraiment je n'ai pas l'impression de tenir un blogue "sérieux" ! Mais je le tiens sérieusement, et j'espère avec la retraite à venir dans trois mois, devenir aussi régulière que vous...
Pierre Bilger ne blogue plus que très rarement.
Lui, je suis d'accord avec vous, c'est du sérieux. Je l'avais rencontré dans les premières réunions de blogueurs parisiens en 2004, et je n'étais pas peu fière qu'il m'ait inscrite dans sa blog roll !
Si vous avez parcouru mes dernières notes vous aurez vu que je recherche pour la FING des candidats "séniors" pour un entretien sur leurs usages d'internet. Est-ce que cela vous intéresserait d'y participer ?
nous avons pu admirer récemment des tableaux de Suzanne valadon au petit musée non dénué d'intêret de Bagnols sur Ceze.